Ecrit d'invention
Dissertation : Ecrit d'invention. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Constance Caruzzo • 4 Juin 2017 • Dissertation • 814 Mots (4 Pages) • 536 Vues
CARUZZO 1er ES2 15/09/14
Constance III/ Ecrit d’invention :
Un verre à la main, je pris le risque de me mêler à la foule. Balloté dans un sens, puis dans l’autre, j’avais le sentiment de naviguer sur une mer agitée. C’est alors que je décelai un effluve familier. Un parfum enivrant et piquant. Son odeur. Et bientôt, des images du passé se mêlèrent à celles du présent. Je succombai alors, et me laissai entraîner dans une valse lente, douloureuse mais délicieuse à la fois, d’une violente nostalgie. Sa main au creux de la mienne, son doux parfum le matin sur l’oreiller, son sourire en coin dans le soleil du matin, ses cheveux noir corbeau sous la lumière lunaire… Je fouillai la salle de mes yeux impatients, comme la main gourmande fouine le fond de ses poches dans l’espoir d’y trouver une sucrerie. Elle était juste là, enserrée dans un fourreau de soie noir. Ses cheveux poivre et sel étaient remontés en un élégant chignon qui me laissait tout le loisir d’observer les courbes délicates de sa nuque. Ses épaules, voilées d’un châle en dentelle noire, ne dévoilaient rien mais suggéraient tout. La sensualité de ses courbes, la cambrure de son dos, tout ce qui avait fait d’elle l’objet de mon désire semblait être intact. Ses mains gantées de soie pianotaient des notes imaginaires sur le marbre blanc du bar tandis qu’elle causait avec le jeune homme qui lui faisait face. Je ne sais pour qu’elle raison, mon cœur se serra à la vue de cette scène. Mais bientôt, son rire pétillant transperça la pièce, et des sentiments d’une autre époque vinrent m’assaillir de toutes parts. Je me rappelai son optimisme naturel, sa malice enfantine, sa gourmandise, sa spontanéité… Et, bientôt, mon cœur saignait des mille coups de poignard que le souvenir de nos moments passés m’assénait. Mais ce fut son regard perçant qui me donna le coup de grâce. Je pouvais encore y déceler aisément toute l’espièglerie de nos jeunes heures, toute la sensualité de nos regards gourmands et juvéniles, bien que leur vert émeraude d’antan ait laissé place à une opaline laiteuse. Son air mutin était toujours plaqué sur son visage, mais il s’accompagnait désormais de pattes d’oie aux coins des yeux, et de quelques ridules aux coins des lèvres. Pourtant, tout cela ajoutait au charme de l’expression malicieuse qui régnait depuis toujours sur son visage. Je fus néanmoins heureux de constater que le vieillissement de son visage n’avait pas eu raison de ses adorables fossettes qui se creusaient sur ses joues dès lors qu’elle souriait. Oui. J’aimais contempler cette femme comme on aime apprécier les contours d’un vestige d’un autre temps, d’une autre époque, qui paraît si lointaine mais si proche à la fois et qui, de toutes les manières, est ancré dans notre histoire. Ses yeux malicieux brillaient sous la lumière éclatante du grand lustre du salon, remplit d’ardeur et de fougue. A l’inverse, tout son être, si gracieux et plein de vie autrefois, semblait s’être vidé de sa vigueur et de sa souplesse d’antan. Ses doigts seuls paraissaient être animés par la même vivacité que dans mes souvenirs. Peut-être que sa passion pour la musique en était le secret ? Ses yeux étaient toujours braqués sur moi. Peut-être qu’elle aussi jugeait des ravages que le temps avait fait éprouver à mon âme ? Oui. Nous semblions tous deux avoir connu notre âge d’or il y a quelques années de cela, déjà. Et, maintenant, notre jeunesse passée ne nous appartenait plus. Seules nos âmes devenaient les détentrices de ces secrets aussi fugitifs qu’éphémères. Irène finit par détourner son regard. Peut-être avait-elle vu dans mes yeux ce reflet. Ce reflet aux nuances laiteuses. Ce reflet qui semble voiler les yeux d’un condamné lorsqu’il attend l’inéluctable, l’inévitable. Ce reflet, paré de sa lumière fugace et prophétique, qui semble annoncer la destruction à venir.
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