Antoine Leiris, Vous n’aurez pas ma haine, 2016
Commentaire de texte : Antoine Leiris, Vous n’aurez pas ma haine, 2016. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Rani Hammadi • 22 Juin 2017 • Commentaire de texte • 2 317 Mots (10 Pages) • 2 047 Vues
Fiche : Antoine Leiris, Vous n’aurez pas ma haine, 2016
Introduction :
L’épouse d’Antoine Leiris, Luna-Hélène Muyal-Leiris, 35 ans, figure parmi les 89 morts de l'attentat commis au Bataclan le 13 novembre 2015 par un commando de Daesh. Le 16 novembre, trois jours après les attentats, le journaliste français publie sur Facebook une lettre ouverte intitulée « Vous n’aurez pas ma haine » qui connait un fort retentissement, faisant notamment la une du quotidien Le Monde. Le texte est partagé près de 230 000 fois en français, traduit dans plusieurs langues.
- Analyse linéaire
Complément circonstanciel qui introduit : « Vendredi soir » montre que cela vient juste d’arriver dans un passé extrêmement proche. On sent donc la proximité du moment mais aussi celle qui s’installe avec l’auteur puisque nous savons tous de quel vendredi il s’agit et donc c’est une exophore mémorielle.
« Vous avez volé la vie » : pronom pluriel → adresse directe aux terroristes.
L’auteur ne s’intéresse pas à qui sont ces personnes et pourtant leur adresse cette lettre. On a ici une atténuation, euphémisme « volé la vie » afin certainement d’appuyer sur l’innocence et la pureté de celui qui est tué.
L’euphémisme insinue aussi que les tueurs n’ont pas tout pris. Ils ont volé la vie mais pas le souvenir ni ce qu’elle a laissé derrière elle ce qui la rend presque immortelle.
Rythme ternaire « un être d’exception, l’amour de ma vie, la mère de mon fils » qui montre l’immensité de l’amour que l’auteur porte à sa femme. Chronologie des étapes de la vie, des étapes amoureuses et la phrase elle même gonfle cet amour avec le parallélisme de construction qui vient donc grossir la phrase et de ce fait accentuer l’importance de sa femme.
Un être d’exception → l’/la mère de mon fils
On touche presque au sacré Oter la vie à quelqu’un qui la donne.
Déterminants possessifs « ma vie », « mon fils » insistent sur cette relation fusionnelle.
La conjonction de coordination mais qui a une valeur d’opposition montre la limite de ce qu’ont fait les terroristes redonnant ainsi le dessus à l’auteur.
« Vous n’aurez pas ma haine » adresse directe encore une fois par une phrase négative qui marque l’échec des terroristes associé au déterminant possessif « ma haine » cela montre l’irréductibilité de l’homme qui est maître de ses pensées, de ses sentiments ainsi que la supériorité de la raison, l’intelligence et la réflexion sur les attentats et leurs bêtises. Le possessif « ma » vient s’opposer au possessif précédent (je m’explique « ils ont volé l’amour de MA vie mais il donnera rien aux terroristes volontairement) parce qu’ils ont volé l’amour de sa vie, la mère de son fils, mais volontairement il ne donnera rien, même sa haine. Cette formule est le titre de la lettre mais aussi le titre du livre où il insère la lettre.
« Je ne sais pas qui vous êtes et je ne veux pas le savoir » l’auteur reprend ici la position de sujet vous → je comme pour montrer sa détermination et le fait qu’il sort de nouveau maître de son destin. La double négation ici (je ne sais pas, je ne veux pas) dévalorise et dénigre les terroristes en montrant le peu d’intérêt qu’il leur porte (verbe de volonté, il choisit de ne pas). « Vous êtes des âmes mortes » périphrase péjorative qui vient désigner les terroristes ou les termes sont très forts, presque oxymoriques (antithèse) qui viennent s’opposer aux « âmes libres » l.13. La liberté est donc pour l’auteur, une valeur indispensable et même synonyme de vie.
« Alors non » l.5 adverbe de liaison marque la conclusion, locution adverbiale lapidaire et indiscutable qui nous montre une forte détermination. « Je ne vous ferai pas ce cadeau de vous haïr » phrase assez surprenante puisqu’elle associe cadeau et haïr, sentiment négatif associé à quelque chose de connoté positivement ce qui sous entend que l’attente des terroristes est donc la haine, accentuer les peurs, la haine, augmenter les communautarismes. On note aussi une polyptote « haine », « haïr » qui souvent viennent clore la phrase l.6/8/12.
« Vous l’avez bien cherché pourtant » l.5 montre une attitude/expression enfantine mais la suite de la phrase (…êtes) loi du Talion ( ← œil pour œil dent pour dent / Rendre la monnaie de sa pièce). Leiris ne va pas dans cette logique. La haine et la colère sont associées même sentiment négatif pour l’auteur. Les deux sentiments négatifs se rejoignent avec le « même » et substantif « ignorance » qui pour l’auteur est la cause première des attentats. Le verbe « céder » montre que l’auteur sera fort, qu’il est déterminé (il refuse de céder) et donc montre l’échec des terroristes et leur entreprise comme il a été dit précédemment. « Ce que vous êtes » l.6/7 montre l’impossibilité de Leiris de les définir ni de les nommer et fait écho aussi à la ligne 2 « Je ne sais pas qui vous êtes et je ne veux pas le savoir ». Ces hommes sont une sorte de type (Balzac, type balzacien voir internet type de personnage), un symbole de tous les terroristes. C’est la complexité de la chose ils ne sont pas des individus distincts, c’est une masse qui représente les terroristes.
« Vous (…) sécurité » l.7/8 rythme ternaire de complétive (que…que…que…) pour insister sur les objectifs des terroristes qui pourraient détruire l’auteur. Le champ lexical de la terreur (œil méfiant, peur…) qui dénonce les intentions des terroristes.
Première fois dans le texte grâce au terme concitoyen, Leiris n’est plus seul face aux terroristes, la société, la République, monde vient s’immiscer dans cette confrontation.
« Perdu. Même joueur joue encore » : De nouveau une réponse lapidaire assez enfantine encore une fois avec un champ lexical du jeu assez déroutant quand même. On ne s’attend pas à ces termes de jeu. Impression que la vie est un jeu. Parabole analogie entre la vie est le jeu. Perdu → échec terroristes, même joueur joue encore → nouvelle vie.
Les 2 premiers paragraphes d’un point de vue énonciatif « je » (première personne du singulier) contre vous (2ème personne du pluriel). A partir du troisième paragraphe on a l’introduction de cette femme. La pronominalisation participe à une certaine pudeur et peut-être une impossibilité de nommer son épouse. Aucune précision de lieu ni de comment cela s’est passé. Cette proposition arrive de manière simple et naturelle on dirait presque qu’il parle de quelqu’un de vivant. Le complément CCT ici vient s’opposer au premier CCT « Vendredi soir » avec le « Ce matin » on sait pas exactement de quel matin il s’agit. Le déictique renvoie à une situation d’énonciation. 3ème paragraphe : « je », « elle » et l’apparition d’un « nous à la fin ». « Enfin… attente » l.9 adverbe note le soulagement assez paradoxal vu les circonstances. Hyperbole avec insistance sur la durée interminable de cette attente à travers ce long CCT « après… attente » qui montre qu’il a certainement pas dormi et que les nuits et les jours se sont comme confondus pour ne constituer qu’un même/seul temps élastique.
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