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La Princesse de Montpensier

Commentaire de texte : La Princesse de Montpensier. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  20 Février 2020  •  Commentaire de texte  •  1 729 Mots (7 Pages)  •  490 Vues

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        On est souvent tenté d’établir un lien entre Hernani et sa fameuse bataille, et les journées révolutionnaires de juillet 1830 qui mirent fin au régime de la Restauration (restauration de la monarchie absolue de droit divin entre 1814 et 1830 après le premier Empire). Si la pièce n’appelle pas de manière ouverte à une révolution politique, elle porte en son sein une réflexion sur le pouvoir. Le fait que l’intrigue se déroule dans l’Espagne du XVI siècle n’enlève en rien à son actualité, comme le sentirent les censeurs, choqués par l’image de la royauté qui y est représentée. En effet, Victor Hugo, offre deux images opposées du pouvoir, l’une négative, incarnée par le roi Don Carlos, l’autre positive, endossée par le même homme devenu l’empereur Charles Quint. Entre ces deux facettes du pouvoir, s’impose la figure tutélaire et mythique de Charlemagne qui occupe la place centrale dans l’acte IV. Nous étudierons donc tour à tour les deux modèles politiques présentés dans la pièce : la royauté avec Don Carlos puis l’empire avec Charles Quint, émule de Charlemagne. Enfin, nous montrerons en quoi cette opposition reflète les conceptions politiques de Victor Hugo et ses engagements à venir.

        Le roi d’Espagne, Don Carlos, est représenté comme mauvais et défaillant dans la pièce de Victor Hugo. Ce qui intéresse le roi au tout début, plus que la politique et l’état du monde, c’est doña Sol. Don Carlos est représenté comme un séducteur frivole, prêt à tout pour se rapprocher d’une femme convoitée : ainsi, il n’hésite pas à se laisser enfermer dans une armoire et à oublier la dignité de son rang (acte I scène 1). Ses premieres paroles dans la pièce donnent le ton : c’est un homme foncièrement irrespectueux à l’égard de tous et moqueur. « La belle adore un cavalier sans barbe et sans moustache encore » v.7, cette citation est dévalorisante pour doña Sol, il l’a réduit à une femme légère, caractérisé uniquement par sa beauté, ce qui est loin d’être le cas alors qu’Hernani, lui, est décrit comme un gamin qui ne connait rien à la vie. De plus l’entrée fracassante de don Carlos révèle d’emblée son caractère violent : il menace de mort la servante puis la secoue par le bras : v.11. Puis il fait usage de cette violence contre doña Sol elle-même. A la scène 2 acte II, le fait qu’il dit qu’il l’aime mène à une véritable scène de combat comme le prouvent les didascalies : « la saisissant avec violence », « Doña Sol se débattant », « elle se jette à genoux. Il cherche à l’entraîner », « elle se débat dans ses bras ». Finalement, il la menace de la faire saisir par un groupe d’hommes : « J’ai là pour vous forcer trois hommes de ma suite » v.546. A la scène 6 de l’acte III, il la prend même en otage. Don Carlos apparait donc, au plan personnel, comme un personnage peu recommandable même s’il est capable, dans certaines circonstances, de respecter le code de l’honneur avec ses ennemis. Ce qui apparait de sa manière de gouverner l’Espagne ne donne pas non plus de lui une image valorisante et positive. La politique, telle qu’elle ressort de ses propos, n’est rien d’autre que du marchandage. Par exemple, pour obtenir la voix de Guzman de Lara aux élections, il est prêt à le soudoyer en lui offrant ce qu’il désire : « Si ce n’est qu’un collier qu’il lui faut, il l’aura » v.1328 puis avec le pape, l’autre dirigeant de l’Empire, Carlos est prêt aux mêmes vices : « Il me fait empereur; alors, en fils docile, je lui rends Naples » v.316-317. Le pays dirigé par Don Carlos montre une conception du pouvoir et une absence totale de considération pour les populations. D’ailleurs, même envers doña Sol, Don Carlos négocie en échange de son amour v.537-538. On peut citer la réplique suivante : « Vous viendrez, et ma main plus que la vôtre est forte. Vous viendrez ! je vous veux ! », prononcée à la scène 2 de l’acte II. C’est un roi capricieux et colérique. Loin d’incarner le preux chevalier, il fait plutôt penser à un roi libertin pouvant être capable de violer celle qu’il désire obtenir. Enfin, jusqu’à sa transformation à l’acte IV, le roi ne tolère pas la contestation. Il se montre sans pitié à l’égard de ses opposants dont il souhaite la disparition totale : « J’ordonne au duc d’Arcs d’exterminer la bande » v.363. C’est pourtant ce même personnage qui, élu empereur, se métamorphose pour incarner, ou du moins annoncer, une nouvelle manière de diriger les hommes.

        Charlemagne, ou Charles « le Grand », est un personnage historique élevé au rang de personnage légendaire : né à une date inconnue et mort le 28 janvier 814 à Aix-la-Chapelle, il fut roi des Francs et couronné empereur à Rome par le pape Léon III en 800. La légende en fait un figure d’empereur idéal. L’acte I s’intitule « LE ROI ». Le lecteur découvre un personnage violent, antipathique et jaloux. La métamorphose du mauvais roi en bon empereur fait partie des coups de théâtre de la pièce. C’est inspiré par Charlemagne que Don Carlos opère sa conversion. Quand il pénètre dans les caveaux qui renferment le tombeau de Charlemagne à Aix-la-Chapelle, c’est d’abord pour surprendre et faire arrêter les conjurés. Mais cette intervention se mue en pèlerinage auprès du tombeau du mort, quand Don Carlos, resté seul, se met à rêver et s’adresse directement à l’esprit du défunt. Il veut « s’élargir l’âme »v.158. Mais, ce personnage évolue jusqu’à faire preuve de grandeur en choisissant la clémence, comme si le tombeau permettait à Don Carlos de ressusciter. C’est la première fois que le personnage fait preuve de gravité et d’élévation en considérant l’importance capitale des rôles joués par le pape et par l’empereur, puis en étant assailli par la conscience aiguë de la finitude humaine : tout destin, même le plus noble, se clôt par la mort (long monologue de la scène 2 acte IV). Don Carlos vient d’apprendre son élection à la tête de l’Empire et renaît, changeant soudainement de comportement et de registre de parole : pour s’adresser à doña Sol, il lui attribue les titres de noblesse que lui confèrera son mariage avec Hernani, a qui il rend sa dignité bafouée jusqu’alors . De plus, il fait preuve de générosité et d’une clémence inattendues et générales « Je veux tout oublier. Allez, je vous pardonne ! » v.?: il permet à Hernani et doña Sol de se marier, fait Hernani chevalier de la toison d’or; il pardonne aux conjurés. Il veut être un exemple, étant passé d’ « altesse catholique » (roi d’Espagne, pays catholique) à « Majesté sacrée » (empereur du Saint Empire germanique) « L’altesse catholique en majesté sacrée ». Il se veut être le fils symbolique de Charlemagne. Cette métamorphose de Don Carlos, devenu un autre homme en si peu de temps fut vivement critiqué par les contemporains de Victor Hugo qui reprochèrent au dramaturge cette invraisemblance. Il est vrai que cette exagération est plutôt soudaine et inattendue. Hugo lui-même ne pouvait l’ignorer. En fait, s’il se laisse aller à un tel coup de théâtre psychologique, c’est parce que l’opposition entre le mauvais roi et le bon empereur sert le message politique de la pièce.

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