Genres et formes de l’argumentation, XVIIe et XVIIIe siècles
Cours : Genres et formes de l’argumentation, XVIIe et XVIIIe siècles. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar SuperPolo23 • 9 Avril 2018 • Cours • 2 664 Mots (11 Pages) • 909 Vues
Objet d’étude : genres et formes de l’argumentation, XVIIe et XVIIIe siècles
Questions sur le corpus (8 points) Question 1 (2 points)
Rappels : - Ne confondez pas genre et registre : le genre est la forme générale du texte (récit, scène de théâtre, poème, lettre….), le registre est la modalité, le ton du texte (comique, tragique, polémique, satirique…). - La situation d’énonciation est la situation dans laquelle une parole a été émise ou la situation dans laquelle un texte a été écrit. La situation d’énonciation répond aux questions : Qui parle (le locuteur, ou narrateur dans un récit, ou encore l’auteur par exemple dans une autobiographie) ? À qui (destinataire) ? À quel moment ? Où ? Les indices de l’énonciation peuvent être les pronoms personnels de la première et de la deuxième personnes, les déterminants et les pronoms démonstratifs, les mots qui indiquent le lieu et le temps, les déictiques, les temps verbaux...
Éléments de réponse : Les deux textes du corpus appartiennent à des genres différents et reposent sur des situations d’énonciation différentes. Le texte A est un extrait du conte philosophique de Voltaire, Candide. Un conte philosophique est un récit fictif, écrit par l’auteur dans le but de peindre une critique de la société. On y retrouve les caractéristiques du genre du conte, qui est un récit de faits, d’aventures imaginaires, destiné à distraire. L’auteur a recours au conte pour transmettre des idées et des concepts à portée philosophique. Puisque le récit est imaginaire, l’auteur feint de porter un regard objectif sur les hommes, ainsi que le fit Montesquieu dans les Lettres persanes, pour mieux dénoncer ce qu’il condamne. Ici, la guerre décrite, censée opposer les Abares et les Bulgares, n’a jamais eu lieu : il s’agit d’une situation fictive, dans laquelle évolue un héros dont le nom semble lui aussi plus symbolique que réel, Candide. Grâce à cet univers imaginaire, Voltaire va pouvoir affirmer sa position sur les guerres qui touchent véritablement l’Europe de son temps, mais par le biais d’une argumentation indirecte. En ce qui concerne la situation d’énonciation, on constate que la présence du narrateur n’est pas perceptible (le récit est fait à la troisième personne) ; le moment n’est pas précisé : le texte est à l’imparfait, temps du récit au passé ; les lieux restent vagues (« un village voisin », « dans un autre village »), de même que les noms des « deux rois » qui auraient pu fournir des indices sur la situation spatio-temporelle : ce « flou » est inhérent à celui du genre du conte (philosophique ici) et sert le projet argumentatif de l’auteur. Le texte de Boris Vian est une lettre, et plus précisément une lettre ouverte, c’est-à-dire un texte qui, bien qu’adressé à une ou plusieurs personnes en particulier, est exhibé publiquement afin d’être lu par un plus large groupe.
CNED Seconde – FR20 – 2017 1
Corrigé-type du devoir 2 2 FRANÇAIS – FR20
La situation d’énonciation est claire, puisqu’on y retrouve la présence du destinataire, interpellé en début de texte : « Monsieur Faber », et celle du locuteur, Vian lui-même, fortement marquée par la récurrence du « je » et par de nombreuses tournures affirmatives comme « Je dis ». La situation spatio-temporelle est précisée à plusieurs reprises : il est question, dans un ordre chronologique, de la Première guerre mondiale (« Je ne sais de quelle guerre vous êtes ancien combattant - mais si vous avez fait la première… »), de la Seconde guerre mondiale (« en 1940 ») et de l’occupation (« quatre ans durant ») ; l’âge du locuteur nous est donné : « j ´ai trente-quatre ans aujourd´hui », et enfin, il est fait mention de la guerre se déroulant actuellement, au moment de l’énonciation : « la guerre d´Indochine ».
Question 2 (3 points) Les deux auteurs dénoncent des aspects différents mais complémentaires de la guerre. Voltaire décrit ici le carnage qu’entraîne toute guerre (le genre du conte philosophique invite à cette généralisation). Il dénonce le fait que lors de l’assaut, les hommes ne sont plus que des pions manipulés sur un échiquier et sont privés de toute humanité, comme le montrent les approximations dans le décompte des morts : « à peu près six mille hommes », « environ neuf à dix mille coquins », « de quelques milliers d’hommes », « pouvait bien se monter à une trentaine de mille âmes ». Le chiffre final, considérable, est annoncé sur un ton en apparence badin : or bien sûr Voltaire, en annonçant le nombre de victimes, souligne l’étendue du massacre. Car c’est bien une « boucherie » à laquelle assiste Candide, terme qui sert à dénoncer à la fois le fait que les hommes sont ramenés à l’état de bêtes qu’on abat, et la cruauté sanglante des actes commis par les deux camps. La description du champ de bataille est atroce, et vise à faire réagir le lecteur contre les comportements inhumains et les destructions engendrés par la guerre : « des tas de morts et de mourants », « des vieillards criblés de coups », « marchant sur des membres palpitants ou à travers des ruines », etc. Le texte de Vian met en avant la manipulation et l’embrigadement dont ont été victimes les civils que l’on a envoyés au combat : « en leur bourrant le crâne de mots d´ordre vides et de prétextes fallacieux ». Les soldats n’ont pas été informés des raisons véritables de la guerre à laquelle ils ont participé, et de ce fait n’ont pas été des « héros », terme que la propagande militariste a longtemps employé, mais des « imbéciles » ignorants : « Se battre sans savoir pourquoi l´on se bat est le fait d´un imbécile et non celui d´un héros », « n´est qu´un homme qui ne sait pas ». Comme Voltaire, Vian refuse que les hommes soient déshumanisés et réduits à l’état de simples « outils » de l’armée et de la politique des États : « des civils, que l´on a revêtus d´un uniforme pour pouvoir les tuer comme de simples objets », « pion obscur dans une mêlée guidée par des intérêts politiques ». Enfin, c’est aussi la mort et la destruction qui sont dénoncées : « combat ignoble sous la gelée de napalm », et la mort « au hasard » : de fait, Vian ne refuse pas de prendre les armes si la cause est juste (« s´il s´agit de défendre ceux que j´aime, je veux bien me battre tout de suite »), mais si la guerre est absurde, injuste et évitable (« celle-là au moins n´était pas inévitable). C’est une position qualifiée d’antimilitariste, ou
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