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Désamour de la lecture

Dissertation : Désamour de la lecture. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  28 Mars 2022  •  Dissertation  •  2 136 Mots (9 Pages)  •  368 Vues

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Composition française

Baudelaire, Diderot et d'Alembert, Voltaire, Flaubert, Genet, Hugo, Molière, … qui étaient autrefois des bannis sont devenus à notre époque de grands ‘’classiques’’ de la littérature française. Certains de leurs écrits ont été longtemps jugés d’immoraux ou portant atteinte à des valeurs éthiques, politiques ou religieuses de la société à laquelle ils appartenaient. Les auteurs de notre époque ne sont pas non plus à l'abri des censures sociales qui ont pour mission de protéger la jeunesse contre toute apologie du vice ou de la violence. Cet état de chose va obliger les acteurs éducatifs à encadrer l'administration de certaines lectures aux apprenants. L'écrivaine et universitaire Danièle Sallenave s'insurge, dans son ouvrage paru aux éditions Gallimard en 2009 « Nous on n'aime pas lire », contre le mépris de l'étude de certains textes au détriment d'autres sous prétexte « qu'ils pensent mal ». Pour elle, l’enseignement des lettres et de la lecture n'aura de sens que lorsqu'il va aussi intéresser les élèves aux « voix qui pensent mal ». La réflexion de l'écrivaine Sallenave nous amène à la problématique du choix des textes dans l'enseignement de la littérature : peut-on tout lire et tout faire lire en classe ? Sans avoir la prétention d'apporter une réponse à cette interrogation nous essayerons de commenter les propos de Sallenave d'une part et de montrer les limites de ses allégations d'autre part.

Notre époque est marquée par une baisse criarde de la lecture. La jeune génération se désolidarise de la lecture de quelque nature qu'elle soit. Le titre de l'ouvrage duquel est extrait la réflexion de Danièle Sallenave en est la belle illustration : « Nous on n'aime pas lire ». Ce titre évocateur dont le registre de langue est à la limite familier accentue cette prise de distance vis-à-vis des lettres qui sont vectrices de la culture humaniste et garantes d'une bonne culture linguistique. C’est avec un ton péremptoire que Sallenave nous livre ses réflexions empreintes d’une sorte de prophétie annonçant une catastrophe avec l’emploi du conditionnel « serait » et l’adjectif « terrible », emploi qui suggère une idée apocalyptique de croire que l’on « étudie » un tel texte au détriment d’un tel autre parce que l’un est plus savant que l’autre ou lorsqu’on le juge allant contre certaines valeurs culturelles, religieuses, politiques, en bref, dépouillé de toute « morale positive ». Elle appelle impérativement à fuir tout jugement qui a trait à un « enseignement de la morale positive » pour s’ouvrir à tout texte. L’expression « grands textes » fait allusion aux textes qui, autrefois, avaient connu le rejet, la censure violente ou subtile de leur époque parce que jugés subversifs mais qui sont aujourd’hui des classiques incontournables de la riche littérature française qui impacte le monde entier. Pour elle, ces grands textes sont des sources inépuisables de « méditation » existentielles ; comme quoi, les rejetés d’hier sont adoubés aujourd’hui et par conséquent, l’enseignement de la littérature et des lettres n’aura aucun sens lorsqu’elle consiste à faire taire certaines « voix qui pensent mal ». Il faut donc familiariser les élèves avec les textes de ces auteurs qui ont connu un rejet de la société à l’instar de Baudelaire dont les Fleurs du mal ont été dénoncées d'immortalité et condamnées pour « outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs », mais elles se feront rétablies en 1945.

L'élève doit avoir accès à toutes sortes de lecture pour en faire sa propre opinion plutôt que de le formater dès son plus jeune âge. Ne dit-on pas que nous sommes des hommes libres ? comment exercer cette liberté si on nous impose déjà une façon de penser, une directive sans nous consulter ? La société condamne généralement ce qu'elle se sait être. L'antisémitisme est condamné aujourd'hui dans la littérature parce que nous avons des sociétés antisémitiques. Il en est de même du racisme, des revers de la sexualité, de la pédophilie et bien d'autres. À l'école on se doit de parler du vrai et de parler du monde tel qu'il est sans tabou. Ce n'est pas elle qui transforme mais c'est la société dans laquelle nous sommes qui arme les enfants, qui les transforme. Étudier des textes qui ont des voix discordantes, c'est amener les enfants à voir le vrai visage du monde dans lequel ils vivent. Rousseau dira que « l'homme est né libre [et bon] et partout il est dans les fers » de la société qui le transforme.

Par ailleurs, dans les textes officiels, les élèves sont appelés à acquérir une culture humaniste qui « contribue à la formation du jugement, du goût et de la sensibilité. Elle enrichit la perception du réel, ouvre l'esprit à la diversité des situations humaines, invite à la réflexion sur ses propres opinions et sentiments et suscite des émotions esthétiques. Elles se fondent sur l'analyse de l'interprétation des textes et des œuvres d'époque ou de genres différents. Elle repose sur la fréquentation des œuvres littéraires, qui contribue à la connaissance des idées et à la découverte de soi … ». D'après les textes officiels, le rôle de l'enseignant est d'apporter une aide à l'enfant à exprimer ses ressentis voire déceler les violences dont il est victime dans sa société. « Donc au petit enfant, donnez le ‘’petit livre’’ » pour reprendre les mots de Victor Hugo dans son poème sur l'instruction intitulé « chaque enfant qu'on enseigne ». L'ignorance n'est-elle pas la nuit qui commence l'abîme ? continue-t-il. Il poursuit en ces termes : « faute d'enseignement, on jette dans l'état (la société) des hommes animaux, têtes inachevées, […] qui marchent à tâtons dans le monde moral ».

Il existe beaucoup d'ouvrages qui retiennent l'attention de par leur originalité même si au fond il traite des sujets qui sont controversés dans la société. C'est l’exemple de Tony Duvert qui reçoit le prix Médicis en 1973 avec son ouvrage Paysages de fantaisie où le personnage principal rêve d'un bordel de petits garçons. Il a reçu le soutien de Roland Barthes qui est une grande figure de la littérature. Claude Mauriac ne tarit pas d'éloges pour cet ouvrage lorsqu'il écrit à son sujet : « des dons et un art que le mot talent ne suffit pas à exprimer ». La littérature doit cesser de ne retenir des écrivains que leur vie publique. Elle doit prendre en compte tous les confins

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