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La séparation des pouvoirs est-elle un mythe ?

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Par   •  15 Novembre 2022  •  Dissertation  •  2 661 Mots (11 Pages)  •  421 Vues

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La séparation des pouvoirs est-elle un mythe ?

Depuis des décennies, la doctrine de « séparation des pouvoirs » a longuement été invoquée commençant par Aristote en théorie passant par Locke qui a proposé cette doctrine pour ensuite arriver à Montesquieu qui l’a invoqué dans « De l’esprit des lois » et qui a conclu que la séparation des pouvoirs était une sorte de recette institutionnelle libérale conçue pour garantir les libertés individuelles. On distingue trois fonctions dans les différents régimes politiques : celle d’édicter les règles, celle de les exécuter et celle de régler les litiges. Desquelles s’en suivent respectivement les pouvoirs législatif, exécutif et juridictionnel ou communément appelé judiciaire. « La séparation des pouvoirs » est un principe de technique constitutionnelle destinée à éviter toute forme de despotisme, d’absolutisme ou de dictature et par suite à garantir et préserver la liberté de chaque individu. Si les pouvoirs étaient unis chez une seule et unique personne on parlerait de dictature ou de monarchie héréditaire. Si ces pouvoirs étaient unis chez un seul et unique organe, on parlerait d’oligarchie, de dictature parlementaire ou d’aristocratie qui représente une sorte d’élite qui reste tout le temps en place. Cette séparation entre ces trois pouvoirs peut être nuancée : on retrouve par exemple dans la constitution américaine ou dans les constitutions françaises de 1791, 1795 et 1848 une séparation stricte des pouvoirs, c’est-à-dire que les trois organes sont indépendants les uns des autres et ne peuvent pas agir les uns sur les autres. Mais il existe également une séparation souple des pouvoirs et donc la possibilité des organes institutionnelles d’agir les uns sur les autres, de se renverser, de se dissoudre ou de se contrôler… Ce système se retrouve généralement dans le régime politique parlementaire alors que le système de séparation stricte se retrouve essentiellement dans le régime présidentiel. Depuis la Déclaration des droits de l’homme de 1789, les révolutionnaires français vont graver dans le marbre la nécessité de la « séparation des pouvoirs ». Par la suite, les constitutionnalistes vont user de cette théorie pour jauger le degré de liberté dans un pays et la nature de son régime. D’après l’article 16 de la DDHC du 26 aout 1789 « Toute société dans laquelle la séparation des pouvoirs n’est pas déterminée n’a point de constitution ». S’en suivent de cet article les lois des 16 et 24 août 1790 ainsi que le décret du 16 fructidor de l’an III. A compter de l’an VIII, les actes d’administration peuvent être contestés devant une juridiction spécifique : le conseil d’Etat. C’est de là que découle la séparation entre l’ordre judiciaire et l’ordre administratif en France, conséquence directe du principe de séparation des pouvoirs, reconnue et confirmée par un PFRLR depuis une décision du conseil constitutionnel de 1987. Il est donc évident que la notion de séparation des pouvoirs a été interprétée et appliquée de plusieurs manières différentes au cours de l’histoire politique et ce, en fonction des différents régimes politique régnants. Et le système de séparation rigide des pouvoirs, au sens traditionnel et classique du terme a été longuement critiqué et présentait pour plusieurs une sorte de système idéologique, irréalisable voire utopique. La séparation des pouvoirs n’est-elle alors rien qu’un simple mythe ?

Il est donc nécessaire de mettre en évidence les limites et les obstacles auxquelles se confronte cette doctrine et qui font que cette dernière ne peut avoir de lien avec la réalité et également de mettre l’accent sur ce qu’implique la séparation des pouvoirs comme conséquences directes et indirectes et comment est-ce qu’on peut juger que ce principe a bel et bien un écho sur la réalité.

  1. LA REMISE EN CAUSE DU « MYTHE » DE LA SÉPARATION DES POUVOIRS

        Des constitutionnalistes en nombre croissant partent du constat de l’inexistence de la « séparation des pouvoirs » ou, du moins, du fait que certains de ses réquisits ne soient pas parfaitement remplis. Mais encore, ils remontent aux sources de la théorie afin de montrer les raisons pour lesquelles celle-ci est historiquement biaisée et conséquemment dans l’incapacité de décrire la réalité des faits.

  1. Le constat de la doctrine

De nombreux manuels de droit constitutionnel consacrent des développements, parfois substantiels, à l’inexistence pratique de la « séparation des pouvoirs » et à son inconsistance théorique. Mais cette théorie n’est pas vraiment très récente vu que dès la fin de la 1ère guerre mondiale, plusieurs constitutionnalistes ont critiqué, voire même éreinté la prétendue théorie de Montesquieu.                                          Le régime parlementaire fut né à l’issue de la baisse du pouvoir des monarchies en Europe lorsque les assemblées parlementaires ont commencé à prendre le dessus sur les pouvoirs du roi. A cause des nombreuses disputes entre les assemblées et le roi, le gouvernement a vu le jour. Au fil des temps, le roi s’est estompé pour laisser une plus grande place à la fonction exécutive du gouvernement. C’est donc le gouvernement qui détermine désormais les conduits et les politiques de la nation. La séparation des pouvoir est dite souple au sein de ce régime avec des mécanismes de régulation en cas de désaccord entre les organes institutionnels. Le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif sont en étroite collaboration et ont des pouvoirs l’un sur l’autres. Contrairement à bien des auteurs français, une partie de la doctrine envisage le régime parlementaire, moniste ou dualiste soit-il, comme un régime d’association et d’entrelacement entre les pouvoirs législatif et exécutif. Loin que ces deux pouvoirs soient séparés, le régime parlementaire opère une sorte de fusion organique entre eux, il est d’après Carré de Malberg                 « l’opposé d’une séparation de ces pouvoirs ». Plus bas, est rejetée la doctrine française selon laquelle le gouvernement parlementaire s’analyserait en un système de dualité des pouvoirs. Aux yeux de plusieurs constitutionnalistes étrangers, le système du cabinet réalise l’unité de la puissance d’État dans les chambres, si bien que le régime parlementaire exclut l’idée de séparation des pouvoirs. La primauté politique de l’exécutif est l’essence du parlementarisme moderne et l’essentiel de ce parlementarisme, c’est le gouvernement de la majorité. En 1934, René Capitant expose dans « La réforme du parlementarisme » que « le régime parlementaire est le contre-pied de la séparation des pouvoirs ». Mais c’est surtout Georges Vedel qui va insister sur la mécompréhension traditionnelle de la pensée de Montesquieu. Dès le mois de juillet 1958, dans une célèbre série d’articles au journal Le Monde, il règle son compte à la doctrine classique en quelques lignes nerveuses qui méritent d’être citées : « Méfions-nous (…) des belles vues a priori sur la séparation des pouvoirs. Montesquieu, réaliste s’il en fut et observateur aigu de la vie politique concrète, doit se retourner dans sa tombe s’il a connaissance des dogmes que de prétendus disciples veulent couvrir de son nom. La séparation des pouvoirs, à la lettre, n’existe pas. Voici plus de quarante ans que le professeur Woodrow Wilson décrivait l’incessant processus de marchandage, de compromis et de parlementarisme de couloirs dans lequel le président des États-Unis est engagé en face du Congrès ».

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