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Qu'est-ce que la socialisation ?

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Par   •  28 Octobre 2019  •  Cours  •  1 597 Mots (7 Pages)  •  441 Vues

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Qu'est-ce que la socialisation ?

Muriel Darmon

Comment la société nous façonne-t-elle ? Les études de la socialisation se sont complexifiées ces dernières années : elles s’intéressent à de nouveaux acteurs comme les enfants et à de nouvelles questions telles que l’apprentissage des rôles de femme ou d’homme, de parent, de malade, etc.

Sur la vitrine d’un café à Londres, on peut lire : « Socialize, eat, drink » ; sur les murs d’une salle de gymnastique pour enfants : « Socialisation, éveil, épanouissement » ; dans un arrêté de 1999 sur le cahier des charges des institutions médico-sociales : « une bonne sociabilisation des résidents ». Aucune de ces occurrences ne correspond à l’usage sociologique du terme auquel il sera fait référence ici. Ce que les sociologies actuelles de la socialisation entendent par cette notion en effet, c’est la construction, le façonnage, la fabrique, la production sociale de l’individu. C’est donc l’ensemble des processus sociaux par lesquels la personne devient ce qu’elle est, ou plus exactement apprend à devenir qui elle est, en fonction de ses conditions matérielles d’existence, de son expérience, des pratiques répétées qu’elle accomplit ou qu’on lui fait accomplir, de l’imitation ou l’imposition des pratiques des autres.

Du destin social aux socialisations secondaires

C’est autour de cette problématique centrale et de ses variations que la sociologie de la socialisation connaît aujourd’hui un essor certain, matérialisé très récemment par la fondation du réseau thématique « Socialisations » de l’Association française de sociologie. Si le terme « socialisation » est ancien en sociologie – on en note de rares occurrences chez Durkheim –, son usage s’est à la fois développé dans la sociologie française depuis une vingtaine d’années, et déplacé par rapport aux usages recensés par l’un des spécialistes du sujet, Claude Dubar, au début des années 1990 dans un manuel intitulé La Socialisation.

Pour penser la socialisation des individus, la sociologie avait d’abord adopté, au début du 20e siècle, une approche assez mécanique de l’identité sociale. Le destin social des individus, mais aussi les rôles professionnels ou familiaux étaient vus comme le produit direct de la structure sociale, sans que les sociologues s’interrogent sur la façon dont ils se transmettaient. À de rares exceptions près, la socialisation primaire – l’influence familiale des premières années – était vue comme toute-puissante, sinon exclusive. Bref, tout se jouait, mécaniquement, avant 6 ans… Divers courants sociologiques, parfois très différents, ont permis au cours de la seconde moitié du 20e siècle d’affiner cette approche. Le fonctionnalisme (Robert Merton) a fait porter l’analyse sur l’apprentissage des cultures professionnelles, et sur les processus de « socialisation anticipatrice ». La sociologie interactionniste (Everett Hugues, Howard Becker) a insisté sur les socialisations secondaires, professionnelles ou déviantes (en étudiant par exemple comment « on devient fumeur de marijuana »). Elle a surtout construit comme objet d’étude la socialisation « en train de se faire », c’est-à-dire non pas « déduite » mécaniquement de la structure sociale mais observée au moment où elle s’accomplit (à l’université de médecine pour les futurs médecins, par exemple). La théorie de l’habitus (Pierre Bourdieu) a fourni un modèle pour comprendre comment le caractère objectif de la structure sociale donne naissance à la subjectivité des individus, qui se construisent en intériorisant le monde social dans lequel ils évoluent.

Depuis une vingtaine d’années, la sociologie de la socialisation s’est développée en complexifiant ces questionnements initiaux dans plusieurs directions. Voyons-en quelques-unes.

La première évolution remarquable, en ce qu’elle encadre en grande partie les autres transformations du domaine, est le développement de la sociologie dispositionnaliste, impulsée par les travaux de Bernard Lahire. Nos manières de faire, de voir, de sentir, nos inclinations à agir ou à croire peuvent s’expliquer par les multiples processus de socialisation qui ont lieu dans différents contextes, par exemple dans la famille. L’ouvrage Tableaux de famille (1) montre ainsi comment le capital culturel se transmet, auprès de quelles instances de socialisation (le père, la mère, la fratrie, la famille élargie), et à l’aide de quels objets (les agendas, les calendriers, l’écrit familial). La socialisation produit ainsi un certain rapport à l’école, à l’écrit ou au temps, qui explique pourquoi certains enfants deviennent des élèves plus en phase avec les réquisits scolaires que d’autres.

Socialisations de genre

C’est ensuite l’étude des socialisations de genre, de comment on devient une femme ou un homme, mais aussi de quels types de femme ou d’homme on devient, qui ont connu une forte croissance. La bibliographie disponible était très réduite dans la sociologie française des années 1990. Les sociologues s’intéressent depuis à la manière dont le genre se construit : avant la naissance par la chambre du bébé à naître ou les vêtements prévus, puis tout au long de l’enfance par la large palette des « objets de l’enfance » (couleurs et types de vêtements à nouveau, stéréotypes genrés dans la littérature ou la presse de jeunesse, jouets pour garçons et jouets

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