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Les liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos

Commentaire de texte : Les liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos. Recherche parmi 299 000+ dissertations

Par   •  2 Janvier 2022  •  Commentaire de texte  •  3 900 Mots (16 Pages)  •  260 Vues

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Explication linéaire: Pierre Choderlos de Laclos, Les liaisons dangereuses. Choderlos de Laclos, 1782 - lettre 81.

        Roman épistolaire du XVIIIème siècle, Les Liaisons dangereuses narrent les manigances de deux libertins : la marquise de Merteuil et le Vicomte de Valmont.

        Il s’agit d’une œuvre qui, même si elle s’inspire des mœurs libertines d’une aristocratie en déclin, est une pure fiction.

        Dans l’extrait que nous allons étudier, c’est un personnage brillant mais manipulateur qui se saisit de la plume : la marquise de Merteuil dans la lettre 81 (située au milieu du roman épistolaire) adressée au Vicomte de Valmont, son ex-amant et complice. Elle y fait son propre portrait en expliquant son évolution et son apprentissage du machiavélisme suite à une mise en garde de Valmont sur Prévan connu lui aussi pour sa débauche.

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Lettre LXXXI (81) extrait, Les Liaisons dangereuses,

Choderlos de Laclos, 1782.

« Entrée dans le monde dans le temps où, fille encore, j’étais vouée par état au silence et à l’inaction, j’ai su en profiter pour observer et réfléchir. Tandis qu’on me croyait étourdie ou distraite, écoutant peu à la vérité les discours qu’on s’empressait à me tenir, je recueillais avec soin ceux qu’on cherchait à me cacher. Cette utile curiosité, en servant à m’instruire, m’apprit encore à dissimuler : forcée souvent de cacher les objets de mon attention aux yeux de ceux qui m’entouraient, j’essayai de guider les miens à mon gré ; j’obtins dès lors de prendre à volonté ce regard distrait que vous avez loué si souvent. Encouragée par ce premier succès, je tâchai de régler de même les divers mouvements de ma figure. Ressentais-je quelque chagrin, je m’étudiais à prendre l’air de la sérénité, même celui de la joie ; j’ai porté le zèle jusqu’à me causer des douleurs volontaires, pour chercher pendant ce temps l’expression du plaisir. Je me suis travaillée avec le même soin et plus de peine, pour réprimer les symptômes d’une joie inattendue. C’est ainsi que j’ai su prendre sur ma physionomie cette puissance dont je vous ai vu quelquefois si étonné.

J’étais bien jeune encore, et presque sans intérêt : mais je n’avais à moi que ma pensée, et je m’indignais qu’on pût me la ravir ou me la surprendre contre ma volonté. Munie de ces premières armes, j’en essayai l’usage : non contente de ne plus me laisser pénétrer, je m’amusais à me montrer sous des formes différentes ; sûre de mes gestes, j’observais mes discours ; je réglai les uns et les autres, suivant les circonstances, ou même seulement suivant mes fantaisies : dès ce moment, ma façon de penser fut pour moi seule, et je ne montrai plus que celle qu’il m’était utile de laisser voir.

Ce travail sur moi-même avait fixé mon attention sur l’expression des figures et le caractère des physionomies ; et j’y gagnai ce coup d’oeil pénétrant, auquel l’expérience m’a pourtant appris à ne pas me fier entièrement ; mais qui, en tout, m’a rarement trompée. »

Problématiques possibles :

1-En quoi la marquise de Merteuil s’oppose-t-elle aux femmes de son époque dans cette lettre?

2-En quoi la marquise de Merteuil critique-t-elle l’éducation traditionnelle en affirmant sa liberté?

3-Quelle peinture fait-elle de la condition de la femme dans cet extrait?

L’extrait de la lettre se compose de trois mouvements:

-de la ligne 1 à 8, le rejet, par la Marquise de Merteuil, de l’éducation traditionnelle, de la ligne 1 « Entrée… » à « …ma figure », ligne 8.

-de la ligne 8 à 21, la duplicité du personnage, de la ligne 8 « Ressentais-je » à « laisser voir », ligne 20.

-de la ligne 20 à 23, la révélation d’un personnage libertin et la mise en évidence des principes des Lumières.

Analyse linéaire.

Lettre LXXXI (81) extrait, Les Liaisons dangereuses,

Choderlos de Laclos, 1782.

I. Premier mouvement: Le rejet de l’éducation traditionnelle (critique de l’éducation des femmes à l’époque). 

        1.1. Une éducation personnelle basée d’abord sur l’observation.

« Entrée dans le monde dans le temps où, fille encore, j’étais vouée par état au silence et à l’inaction, j’ai su en profiter pour observer et réfléchir. Tandis qu’on me croyait étourdie ou distraite, écoutant peu à la vérité les discours qu’on s’empressait à me tenir, je recueillais avec soin ceux qu’on cherchait à me cacher.

-« Entrée dans le monde »: marque du féminin dans le participe passé « entrée ». Emettrice de la lettre, la marquise de Merteuil, femme libertine et indépendante d’esprit. Culte du moi, scène théâtralisée « entrée dans le monde ».

-« fille encore »: Apposition => rappel de sa jeunesse, événement passé (utilisation des temps du passé également: imparfait, passé simple). Elle revit la position qu’elle avait quand elle était adolescente (ses réactions juvéniles). Les autres la voyaient comme un enfant.


-Constat de la marquise: les femmes en général sont ramenées au simple statut d’
objet (réduites à une passivité importante) : « vouée par état au silence et à l'inaction »: le terme « vouée » insiste sur l'idée de destin, et leur destin est de ne pas parler (« silence »), de ne pas bouger (« inaction ») = de n'être rien, un simple objet inanimé. Elle va tirer profit du désintérêt qu’on lui porte. Les femmes ne sont pas perçues comme des êtres pensants, on ne fait jamais appel à leur intelligence, leur réflexion. C'est une idée de révolte qui la motive : elle a cherché à dépasser sa condition, remise en question des lois sociales , sur leur aspect figé qui déterminent une condition = un « état ».

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