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Finck, La Troisième Main

Commentaire de texte : Finck, La Troisième Main. Recherche parmi 299 000+ dissertations

Par   •  2 Avril 2019  •  Commentaire de texte  •  1 826 Mots (8 Pages)  •  314 Vues

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L2 lettres

Michèle Finck La Troisième Main

Commentaire du poème (p. 45)

La musique, à part de nous faire éprouver les sentiments les plus purs, se présente aussi comme une source inépuisable de l’inspiration. Beaucoup des poètes ont écrit sur la musique et sur sa force sublime, mais aujourd’hui on se concentrera spécialement sur l’œuvre de Michèle Finck, son recueil La Troisième Main. Parmi plusieurs poèmes, dignes d’attention, j’ai choisi de commenter celui qui se trouve à la page 45 du livre et répond à l’œuvre de Rachmaninov « Prélude opus 25 №2 ».

Pendant l’étude du poème, nous répondrons aux questions suivantes : comment écrire la musique en mots ? Qu’est-ce la synésthésie et par quels moyens peut-elle être transcrite ? Enfin, nous commenterons les liens entre le poème de Michèle Finck et la pièce musicale à laquelle il correspond.

  1. A la recherche de la musicalité.

Le poème tout court est déjà un mélange de la musique et de la littérature, alors le poème sur la musique doit en contenir beaucoup plus. Il paraît que l’on se trouve devant une mise en abyme – le poème est plus une pièce de musique que le poème lui-même. La musique y est omniprésente – non seulement au niveau sémantique, mais aussi au niveau formel. Par quels moyens est-ce que l’auteur nous fait entendre résonner l’opus de Rachmaninov dans son poème ?

Premièrement, c’est par la structure du poème qu’il produit cet effet. Dès le premier regard, on remarque la construction stricte, organisée et harmonique ; ce n’est pas seulement une construction géométrique, mais – avant tout – musicale. Effectivement, le premier vers nous est présenté comme un prélude ou une ouverture en trois accords – il consiste de trois mots paronymiques ayant le même rythme. On remarque également l’absence de ponctuation – cela s’explique par la volonté du poète de rendre le vers plus mélodique, harmonieux, sans pauses et sans ruptures. La partie principale contient, comme en musique, trois sous-parties qui répondent l’une à l’autre, se dévéloppent et se complètent. Le parallélisme syntaxique nous fait penser à un thème musical qui est assuré tout au long de la pièce. Si on regarde la construction rythmique de ces trois vers très attentivement, on verra que le deuxième vers de la partie principale a un dessin rythmique légèrement différent de ceux des vers un et deux. Cela fait écho à l’organisation de l’œuvre musicale, où la deuxième partie développe la première, et la troisième reprend tout en conclusion. La conclusion ou le postlude de ce poème est présentée par une phrase nominale, au même dessin rythmique que l’ouverture. Alors, chaque phrase (comprise sytaxiquement – du point au point) nous rappelle une phrase musicale, avec ses notes et ses accords. La construction syntaxique a encore à voir avec le mot qui se trouve au dernier vers – « arpège ». Les mots dissyllabiques, les allers et les retours font effectivement penser aux arpèges joués dans l’opus de Rachmaninov. C’est ici que se trouve une mise en abyme – le poème non seulement parle d’une œuvre musicale, mais aussi l’est.

Ensuite, la musicalité de ce poème se traduit par la phonétique et le rythme des vers. La première chose qui saute aux yeux, c’est, bien entendu, l’allitération en V. Parmi les quatorze mots du poème (sans compter les articles et les prépositions), dix commencent par un V. Ce son labio-dental fricatif nous renvoie à une vibration des cordes, omniprésente tout au long du poème. Peut-être cette allitération donne également aux lecteurs la sensation de la lumière qui résonne dans chaque mot de l’œuvre. On parlera de la lumière plus particulièrement dans la deuxième partie de notre étude. L’allitération dans ce cas est comme un motif musical qui revient dans chaque partie du thème. Aussi, il est à remarquer que le rythme du poème est très strict et organisé. Comme la pièce musicale, la pièce littéraire suit un battement net et distinct. Il est intéressant que presque dans tous les cas chaque mot se présente comme une unité rythmique, avec un temps faible et un temps fort. Ce rythme ïambique résulte, sans doute, de la volonté du poète de transcrire en mots l’œuvre de Rachmaninov – chaque mot est indissociable et en même temps intégré dans l’harmonie générale. Ainsi, nous avons étudié la musicalité de ce poème – avec les effets de la phonétique et de la construction syntaxique Michèle Finck crée une mise en abyme : en parlant d’une pièce musicale, le poème lui-même se présente sous forme de la pièce musicale.

  1. La synesthésie. Selon le dictionnaire de Larousse, la synesthésie est une « expérience subjective dans laquelle des perceptions relevant d'une modalité sensorielle sont régulièrement accompagnées de sensations relevant d'une autre modalité, en l'absence de stimulation de cette dernière ». Nous verrons en quoi ce phénomène a lieu dans le poème de Michèle Finck.

De prime abord, les lecteurs remarquent la présence de deux isotopies distinctes : celle de la musique et celle de la vision. Les sèmes musicaux sont exemplifiés par les mots « sons », « rythmes », « doigts » (qui jouent sûrement d’un instrument musical), « arpèges » et, ce qui est un peu plus sophistiqué – « vitesse ». De son côté, l’isotopie de la vision est exemplifiée par « voient » (à trois reprises), « vision », « voyance ». Il est clair que ces deux isotopies interagissent entre elles et se mélangent. Ainsi, toute la partie principale du poème (vers 2-4) est fondée autour ce mélange : « les doigts voient », « les sons voient », « les rythmes voient » ; et l’accord final est joué par la phrase averbale du dernier vers – « arpèges de la voyance ». C’est ici que l’on trouve le phénomène de la synesthésie – la musique, appartenant au domaine de l’audition, nous soulève au domaine de la vision, et elle voit et regarde elle-même. Cette musique va au-delà de la conception classique ; elle ouvre nos yeux sur la vérité (v.4 « les sons voient : vérité »). Il est encore plus intéressant d’étudier ce phénomène, si on se rappelle de la condition dans laquelle Michèle Finck écrivait son œuvre. A la dernière page du livre, elle décrit son expérience : elle ne voyait rien, elle était dans le noir presque total, et c’est par musique et par littérature qu’elle survivait. Alors, le phénomène de la synesthésie a vraiment eu lieu : la musique a aidé à son poète de revoir la lumière, et Michèle Finck transcrit dans le poème les effets de vision.

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