Corneille STANCES à Marquise

1) « Stances à Marquise » est un poème composé de huit quatrains, formés d’heptasyllabes en rimes croisées type (abab).

2) Le poème s’ouvre sur une apostrophe « Marquise » qui désigne la femme, destinataire du poème, elle est suivie d’un pronom personnel « mon » désignant l’auteur lui même.

S’en suit une alternance de « vous », « vos » et de « mon », « je », avec l’ajout de plusieurs « nos » qui lie l’auteur à la femme à laquelle il s’adresse. C’est donc bien Corneille qui parle à Marquise-Thérèse de Gorla. Il y a un jeu entre le « je » et le « vous » qui représente la femme aimée.

3) Le poème reprend des caractéristiques du Carpe Diem comme le thème traditionnel de la beauté associé au temps qui passe dans la métaphore de la rose qui se fane « saura faner vos roses » (v 7) il est accentué par l’emploi du futur.

Nous avons une personnification du temps « le temps aux plus belles choses se plaît à faire un affront » qui montre la même chose.

Il y a plusieurs représentations du temps qui passe, « front ridé » v 8, le cours des planètes v 9, nos jours et nos nuits v 10, immuabilité du temps.

Puis un jeu d’opposition, un chiasme « on m’a vu ce que vous êtes/vous serez ce que je suis » qui montre l’inversion des rôles avec le temps qui passe, les deux sont soumis aux mêmes règles, avec l’utilisation du présent et du futur.

A travers l’impératif « Souvenez vous » à la première strophe Corneille fait référence au memento mori et s’inscrit dans la tradition du carpe diem, profite de l’instant présent. Cette philosophie est reprise dans la dernière strophe avec l’utilisation de l’impératif « Pensez y » qui invite à profiter du temps présent et qui forme une sorte de morale du carpe diem, « il vaut bien qu’on le courtise ... » insiste sur une situation actuelle, n’attendez pas demain pour me courtiser.

4) L’ironie est présente tout au long du poème.

Pour commencer le titre « Stance » ne correspond pas au poème car le « stance » est un poème lyrique d’inspiration grave et religieuse or ce poème est une fausse déclaration d’amour d’un homme éconduit.

Le premier quatrain donne le ton, Corneille s’adresse à Marquise d’une manière un peu sans gêne « vous ne vaudrez guère mieux », il y a un décalage qui créé une ironie.

A chacune des trois premières strophes Corneille n’épargne pas la jeune femme en évoquant la future vieillesse qui l’attend, l’effet de surprise donne l’effet comique.

« Il saura faner vos roses / Comme il a ridé mon front ». Corneille fait là  une mise en parallèle pleine d’ironie, avec une petite touche d’humour. La beauté physique et la légèreté de l’amour pour elle (rose), l’esprit et le pragmatisme pour lui (front). 

Mais il y a aussi un coté osé qui accentue cet effet ironique.

Ainsi, le champ lexical de la beauté, « aux plus belles choses », « vos roses », « quelques charmes », l’oxymore « qui sont assez éclatant », « belle », « belle marquise », « fait comme moi » est accompagné d’un sens plus vulgaire. Par exemple, quand marquise rime avec courtise qui évoque la conquête, un thème libertin, ou, l’évocation des charmes de la femme dans un sens plus sexuel, « vous en avez qu’on adore ».

Dans les derniers vers, Corneille fait encore preuve d’une ironie teintée d’humour, «Quoi qu’un grison fasse effroi ».

Ensuite, il affiche son orgueil avec si peu de retenue, que le poème tourne au comique et à l’autodérision : « Il vaut bien qu’on le courtise / Quand il est fait comme moi ».  

5) La référence à la rose typique en poésie, pour une métaphore à la beauté et à la fragilité de la femme, fait effectivement penser à la poésie de Ronsard dans « Mignonne » mais surtout « Quand vous serez bien vieille », poème dans lequel Ronsard veut séduire Hélène en lui peignant les conséquences d’un refus de sa part à ses avances amoureuses.

...