La Grande Peur
Étude de cas : La Grande Peur. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Astrid de Casabianca • 19 Mars 2016 • Étude de cas • 1 654 Mots (7 Pages) • 1 371 Vues
Astrid de Casabianca
Khôlle Publique – Suppléante
LA GRANDE PEUR
" Le roi fait brûler tous les châteaux, il n'en veut pas d'autres que le sien". Ce libelle qui court à partir de la mi-juillet 1789 s’accompagne de rumeurs selon lesquelles dix mille piémontais auraient envahi le Dauphiné, et la France serait envahie par des brigands. De telles rumeurs témoignent de l’état psychologique des français qui donne du crédit aux idées qui circulent. Ainsi, du 20 juillet au 6 août 1789, un phénomène s’étend sur la France des campagnes : « La Grande Peur ». D’après l’historiographie, on a longtemps cru que l’événement s’était déclenché partout à la fois, et qu’il avait été consciemment élaboré, jusqu’à la théorie de Georges Lefebvre. Son livre La grande peur de 1789 révèle donc une analyse précise à l’échelle nationale et une tentative d’interprétation cohérente.
La « Grande Peur » est une série de paniques en réactions en chaîne provenant de six sources et qui se déroulent pendant trois semaines. L’agencement de ces paniques suit un principe souvent le même : un voyageur de passage ou un habitant d’une localité voisine vient annoncer dans un village qu’une bande « brigands » a été vue la veille, et que son arrivée est imminente. Ces malfaiteurs saccageraient tout sur leur passage, pillant et détruisant les champs. La réaction paysanne est si forte que tous s’arment de faux, fusils et broches et s’apprêtent à contrer le prétendu ennemi. Au lieu de se barricader dans leur chaumière, ils se mobilisent donc en masse, témoignant d’une unité paysanne renforcée, pour faire face à un ennemi invisible. Invisible, mais pas tant pour eux, puisqu’ils voient dans la prétendue arrivée de mercenaires une action de la noblesse qui chercherait à fomenter une répression à l’encontre des provinciaux afin de récupérer leur pouvoir politique. En effet, la Grande Peur est une conséquence directe des événements qui se déroulent à Versailles et à Paris entre le 17 juin et le 14 juillet 1789. La tension qui règne dans ces affrontements entre le Tiers-Etat et la Noblesse viennent nourrir une dynamique contestataire qui entraine la rupture de 1789. Ainsi, ne voyant pas l’ennemi arriver, les paysans déjà armés se ruent alors sur les châteaux, possessions seigneuriales, et ce qui attrait à l’ordre privilégié. Pillages, émeutes et mouvements violents prennent alors de puissantes proportions, motivés par l’engouement que suscite la prise de la Bastille, le 14 juillet 1789.
Ainsi, si la Grande Peur surgit au premier abord d’une série de rumeurs, elle n’en est pas moins le fruit d’un système juridique et social fragile et en déséquilibre. Elle s’explique par la succession d’événements politiques dans un contexte de crise. Réveil des campagnes, la Grande Peur est le moment charnière entre l’Ancien Régime et l’élaboration d’un nouvel ordre politique. A la fois participant à la Révolution française, elle est également suscitée par elle, nourrie par la Révolution française, elle contribue à le développer. Sur quels principes le phénomène de la Grande Peur s’est-il érigé ? Quel a été son rôle dans la Révolution française ?
La Grande Peur surgit au moment où les campagnes subissent l’affront inégalitaire des structures d’une société dont le pouvoir central est accaparé par les membres de la Noblesse. Cette instabilité provoque des tensions qui apparaissent déjà avant la Révolution française, transcrites par des émeutes plus fortes là où le pouvoir féodal est le plus affirmé. Décrets et actions politiques débouchent sur la montée des revendications dans les provinces, mais aussi sur la crainte de représailles de la part de la monarchie. La théorie du complot aristocratique au lendemain de la prise de la Bastille prend une envergure telle que les paysans se sentent menacés. Cette crainte engendre de violentes tensions qui participent à la dynamique révolutionnaire du moment. La Grande Peur marque donc l’arrivée de la caste paysanne, l’affirmation d’un groupe sur le territoire Français dans le grand processus qu’est la Révolution française.
- La situation des campagnes dévoile une instabilité réelle
- Les structures de la société agraire et de l’économie créent un potentiel d’animosité envers les seigneurs : un ordre social et un système agricole pesants
- Des différences de conditions, de richesses, de pouvoirs : la noblesse française se partage les terres et soumet le paysan
- Des conditions météorologiques capricieuses entraînent une mauvaise récolte
- La hausse des prix atteint son paroxysme : une crise de subsistance
- Les mouvements paysans sont animés par un esprit de contestation de l’autorité
- La succession de « jacqueries » ou révoltes déjà à partir d’août 1788 dévoile un climat d’instabilité
- Les émeutes frumentaires se multiplient non seulement dans les villes, mais aussi dans les campagnes, comme en mars en Provence ou en mai en Picardie !
- La rédaction des cahiers de doléances et les événements des Etats Généraux comme premiers vecteur de tensions entre le Tiers-Etat et l’ordre dominant
- Les cahiers de doléances apportent un espoir de réformes motivé par la possibilité de prise de conscience de la situation par le roi, mais également la crainte de voir les puissants opposants s’organiser
- Les événements de Paris et Versailles depuis le 17 juin avec la résistance de la Cour à la décision du Tiers de se provoquer Assemblée nationale provoquent l’appréhension des campagnes
- La destitution de Necker, la prise de la Bastille, les mouvements de troupes à proximité de Versailles puis les débuts de l’émigration des nobles stimulent la crainte de représailles de la part de la noblesse
Ainsi au lendemain de la victoire populaire du 14 juillet, les campagnes sont dans une situation de crise, l’agitation traverse les régions et engendre une crainte de représailles de la part de la Monarchie aidée des puissances étrangères. Comment penser que le Roi puisse abandonner son pouvoir par faiblesse ?
- La situation instable engendre des tensions relayées par la montée des rumeurs
- La rumeur du complot aristocratique croît depuis Paris, au lendemain de la Révolution française
- Les nobles semblent être prêts à tirer parti de tous les alliés possibles : troupes étrangères, bandits de grand chemin, errants pour piller villages et récoltes
- La rumeur s’enfle entre le 15 et le 20 juillet et gagne tout le royaume dans une puissante dynamique de propagation
- L’insécurité gagne du terrain, la situation est explosive en province où les révoltes frumentaires et antiseigneuriales sont de plus en plus nombreuses
- La Grande Peur naît à partir du 20 juillet dans un climat de propagation de la rumeur du complot aristocratique
- Des paniques collectives sont engendrées à partir de rumeurs selon lesquelles des groupes de brigands recrutés par l’aristocratie seraient en chemin pour venir semer la terreur dans les localités
- Les alarmes se propagent très loin à partir de six paniques originelles, « des paniques de relais » (Nantes, La Ferté-Bernard, Ruffec, Estrées, Romilly, Louhans)
- Les habitants prennent les armes et se préparent à une éventuelle offensive qui finalement n’aura pas lieu
- Les tensions éclatent, la violence atteint son paroxysme
- Formation de milices paysannes pour se défendre contre les prétendus brigands
- Ne rencontrant pas ces brigands, les paysans armés s’en prennent aux châteaux et tente de s’affranchir des redevances en brûlant les droits de propriété, preuves qu’ils doivent payer
- Partout des pillages, émeutes et attentats éclatent, des propriétés seigneuriales sont dévastées
La crainte du pillage engendre un état d’alarme qui aboutit à des tensions réelles. La réaction est donc très forte et révèle une évolution dans la façon de penser des paysans en quête d’émancipation.
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