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La bonheur est-il affaire de politique ?

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Par   •  24 Octobre 2021  •  Dissertation  •  1 818 Mots (8 Pages)  •  2 614 Vues

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Le bonheur est-il affaire de politique ?

L'idée que le bonheur puisse être un objectif politique apparaît à la fin du XVIIIème siècle, de manière explicite dans la déclaration d’indépendance des Etats-Unis, puis dans l’article 1 de la constitution française de 1793 qui postule que « le but de la société est le bonheur commun », idée qui sera reprise dès l'année suivante par Saint-Just avec sa célèbre phrase : « le bonheur est une idée neuve en Europe ». Mais peut-on néanmoins légitimement considérer que le bonheur est affaire de politique ? Associer ces deux notions est en effet chose complexe.  Celle de politique s’entend comme désignant toutes les actions et décisions qui concernent la vie de la cité. Elle s’occupe du bien commun ou de l’intérêt général. Le bonheur semble, lui, bien plus difficile à définir. Les philosophes le désignent généralement comme un état de complète satisfaction, caractérisé par sa plénitude et sa stabilité. 

Dans la philosophie antique (Epicure a écrit le premier traité du bonheur : La lettre à Ménécée), c’est même le but de la vie humaine, fin parfaite et Souverain Bien (Aristote). La philosophie moderne (Schopenhauer, Camus, Sartre, Kant) est beaucoup plus pessimiste sur sa possibilité : ce pourrait bien être un idéal inaccessible, un optimum fantasmé, mais impossible à réaliser.

Mais justement, comment parvenir à une telle satisfaction ? Surtout, chaque individu n’est-il pas le mieux placé pour savoir ce qui le rendra heureux ? Et même, comment quelqu’un d’autre pourrait-il seulement savoir, à sa place, qu’il est heureux ? Il paraît alors bien difficile de dire que le bonheur puisse relever de la politique et dépendre d’elle.

Il semble en effet  que le bonheur soit seulement une affaire privée qui relève du choix de chaque individu, dépend de son intérêt particulier et se mesure à ses sentiments personnels. Le pouvoir politique n’a donc pas à intervenir, puisqu’il assure seulement ce qui concerne le bien commun. Dans ce sens, la politique porterait atteinte à la liberté des individus et les rendrait donc plutôt malheureux si elle prétendait s’occuper de leur bonheur à leur place, parfois même malgré eux et de manière autoritaire. Si elle donnait un modèle unique de bonheur en niant l’existence de différences entre individus.  Et pourtant, tout ce qui relève de la compétence de l’Etat (dans les régimes démocratiques tout au moins) a pour but affiché et assumé d’assurer le bonheur des membres de la société. Le bonheur serait donc le but ultime de toute activité activité politique. Ainsi le problème est de savoir si le bonheur relève du domaine public, s’il est affaire de politique ou si c’est avant tout une affaire privée dans laquelle elle n’a pas à intervenir. Cette question en appelle d’autres : comment concilier l’influence de la politique sur les individus et le fait que le bonheur soit propre à chacun ? Que peut-on légitimement attendre de la politique de ce point de vue ?

Afin de tenter d’apporter des éléments de réponse à la question posée, nous verrons donc tout d’abord que le bonheur peut sembler être avant tout une affaire éminemment privée, indépendante de la question politique, dans laquelle elle ne peut intervenir. Nous considérerons ensuite que l’homme étant cependant un « animal politique » au sens d’Aristote, son bonheur relève bien de la politique, voire même qu’il est peut-être son seul but. Nous montrerons enfin que le rôle le plus important de la politique est finalement d’être garante de la liberté de chacun de rechercher le bonheur et de ses conditions d’accès.

I.- Le bonheur, une affaire qui peut sembler éminemment privée

Le bonheur étant une notion éminemment subjective et personnelle, propre à chaque homme, la politique n’aurait ni le pouvoir ni les moyens de s’en (pré)occuper. Faire du bonheur une affaire politique, avec trop d’ingérence de l’Etat, porterait même atteinte à la liberté de l’individu, de chaque citoyen.

1.- La notion même de bonheur apparaît comme étant par essence subjective et personnelle. Kant le définit par exemple comme « la satisfaction de tous mes penchants ». Il s’agit donc d’un sentiment intime, personnel, et même presque incommunicable. Ensuite, nous n’avons pas les mêmes goûts, les mêmes préférences ni la même personnalité, si bien que chaque individu ne trouvera pas son bonheur de la même manière que les autres.

Le bonheur est donc d’abord une affaire privée puisque chaque citoyen possède sa définition personnelle du bonheur et est en outre le mieux placé pour le poursuivre. Le philosophe Epicure propose ainsi à chaque homme de classer ses désirs et de se concentrer sur ses désirs naturels et nécessaires. Il conseillait aussi de s’occuper d’abord de ses amis et de sa famille pour être heureux. Son école philosophique s’appelait « le jardin » et ne s’occupait pas de politique. Un Etat ne peut donc imposer sa définition du bonheur aux individus.

De plus, c’est chaque citoyen qui expérimente dans son esprit le sentiment du bonheur. Selon les philosophes stoïciens, comme Epictète par exemple, le fait d’être heureux relève de notre pensée personnelle et non d’une action politique.

2.- En tant qu’expérience personnelle, le bonheur ne relèverait donc pas de la politique.

La politique n’aurait ainsi ni le pouvoir ni les moyens de s’occuper du bonheur, par nature individuel. Comme le remarque encore Kant, le bonheur est « un concept indéterminé ». Il est déjà difficile à chacun de savoir pour lui-même ce qui pourra le rendre heureux, alors comment l’Etat pourrait le savoir ? Il n’est sans doute pas compétent, d’autant qu’il ne pourrait proposer qu’une seule vision du bonheur, et la même pour tous. Si la politique se mêle du bonheur des individus alors elle donne un modèle unique de bonheur en niant l’existence de différences entre les individus. Nous avons ici l’idée d’un pouvoir autoritaire dont l’objectif serait de rendre les hommes heureux malgré eux et selon un certain modèle.

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