Jouer avec la langue

L

e jeu avec le langage est instinctif chez l’Homme depuis sa naissance. Il joue naturellement avec le son, le rythme et les images du langage. Ce dernier est avant tout un instrument de communication mais il peut être utilisé à des fins artistiques comme la poésie.

La poésie n’est-elle que dans les vers ? Certes, on associe souvent la poésie à la versification mais on peut également la trouver sous forme de prose.

L

a tradition poétique française lie habituellement la poésie au travail de versification car les vers apportent de la musique. Qui dit musique dit rythme, en effet les poètes respectent des mètres qui peuvent être réguliers ou irréguliers. Les vers pairs (6, 8, 10,12 syllabes) donnent souvent une certaine régularité au rythme du poème. Le plus utilisé est le dodécasyllabe (ou alexandrin) avec son rythme régulier il agit comme une berceuse, comme dans le poème de Charles BAUDELAIRE, Parfum exotique.

« Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d’automne,

Je respire l’odeur de ton sein chaleureux,

Je vois se dérouler des rivages heureux

Qu’éblouissent les feux d’un soleil monotone »

Les vers impairs (5, 7, 9, 11 syllabes) sont plus rares. Dans son Art poétique, Verlaine recommande l'emploi du mètre impair avec un ennéasyllabe, il le qualifie de plus léger et moins prétentieux que l’alexandrin.

« De la musique avant toute chose,

Et pour cela préfère l'impair

Plus vague et plus soluble dans l'air

Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. »

La musique traduit également l’euphonie. Les rimes utilisées contribuent à la régularité et au rythme sonore des vers. C’est l’effet que veut produire le poète qui va influencer sur son choix des rimes (pauvres, suffisantes ou riches). Dans Initium, Paul VERLAINE a misé sur des rimes riches.

« Et depuis, ma Pensée - immobile - contemple

Sa Splendeur évoquée, en adoration,

Et dans son Souvenir, ainsi que dans un temple,

Mon Amour entre, plein de superstition. »

Le rappel de même son, comme l’allitération peut faire entendre le sujet, c’est l’harmonie imitative comme dans Le Lac de LAMARTINE (1820), l’allitération des occlusives [t], [d] et [k] font entendre le bruit des rames.

« On entendait au loin, sur l’onde et sous les cieux

Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence

Tes flots harmonieux »

On observe aussi cette contamination sonore dans La légende des siècles de Victor HUGO, dans ces deux vers nous avons l’impression de sentir le parfum des fleurs qui flottent dans les airs. Cela rend donc, plus vivant les vers.

« Un frais parfum sortait des touffes d’asphodèles

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